Je rejoins à nouveau le Coronation bridge, et prends cette fois la direction de Kalimpong, remontant la vallée de la rivière Tista, par une route boisée, agréable, bordées de quelques temples et quelques villages. Des bandes de singes ont envahi les bords de route, et par deux fois, des gros males lancent des simulacres d’attaques en direction de mes mollets ! Je me munie d’un bon bâton et ça les calme. Beaucoup de sourires et de namas te (bonjour). A Teesta je rattrape un groupe de touristes anglais à vélo sans bagages, avec toute une organisation, jeeps suiveuses portant bagages et nourriture. Très sympas, ils m’offrent repas et boissons. Ils sont partis il y a une semaine de Calcutta et arrêtent à Kalimpong. On repasse à nouveau la rivière, et ça monte sec sur les quinze derniers kilomètres, à environ 10% le pus souvent, et mes amis anglais finiront tous dans les jeeps.
Nichée à 1250m, pas très jolie, la ville-bazar, et c’est peu dire, est néanmoins accueillante, très visitée autant par les Indiens que par les occidentaux. Des bandes de jeunes anglais éméchés font un bruit infernal dans le resto du Gompu, grande maison bourgeoise où je m’installe. Le vélo doit rester dehors la journée et un employé le rentre le soir. Du coup, il est tripoté toute la journée par des curieux. Au Gorkhaland comme au Sikkim, les restaurants servent de l’alcool, et ça consomme sec ! Les montagnes alentours sont dans la brume. Balade en ville, dans les marchés. La station de bus et jeeps connaît comme partout une agitation démesurée, pas de problème pour aller où que ce soit, ça part et arrive sans cesse.

A côté du Gompu, des jeunes filles sont allongées sous des couvertures (il fait froid), faisant la grève de la faim pour s’associer au mouvement séparatiste du Gorkhaland.
Je visite les monastères bouddhistes de tradition tibétaine: le Durpin, en haut d’une colline, consacré en 1976 par le Dalaï-lama, Tharpa Choling, puis Thongsa, le plus vieux où les moines sont en prière, les premiers d’une longue série de monastères que je vais visiter dans les semaines qui viennent, au Gorkhaland, et au Sikkim. Je me perds dans les différents ordres bouddhistes, l’interprétation des fresques, peintures murales, tentures, les prières, chants… malgré ma volonté de mieux connaître ce monde fascinant. Je fais toujours un don pour modestement participer à la pérennité de ces lieux.

Un peu plus bas, le centre d’interprétation de la nature abrite des dioramas bien agencés décrivant entre autres les effets des activités humaines sur l’environnement.
Je pars pour Lava à 33km à l’est de Kalimpong. Ça monte d’abord en pente douce puis plus fort avant le village d’Algarah, bien agréable avec ses maisons de bois. Ça reste ensuite en courbe de niveau sur une route boisée, puis ça monte régulièrement à 5 ou 6%. J’atteins une forêt de sapins et dans la descente de 3 km sur la petite ville de Lava, compacte, je freine pour ne pas avoir trop froid. Le soleil s’est caché. Je loge à l’Orchid à l’entrée de la ville, et il faut encore que j’use de toute ma persuasion pour que le vélo soit rentré la nuit. Le tourisme se développe vite ici aussi et une quinzaine de nouveaux hôtels accueillent les voyageurs, presque tous Indiens.
Le monastère, tout récent (1990), comprend plusieurs bâtiments dont un centre de retraite, et abrite au total 110 moines.
Des gamins jouent au foot, d’autres escaladent les murs d’un immense réservoir à sec. J’en dispute deux qui caillassent un énorme crapaud. Après 20h, la ville plonge dans une profonde léthargie, plus un chat dans les rues et calme total
Avant de prendre le chemin du retour, je déambule de bon matin dans les chemins et ruelles où s’installe peu à peu le marché du mardi. Je loge cette fois à kalimpong au Holamba, havre de paix avec ses bungalows confortables installés dans une pépinière, et un parc fleuri, en escaliers sur la colline.
J’ai organisé le soir un départ à 6h du matin, sachant que j’allais en baver pour pédaler jusqu’à Darjeeling.
A 6h j’attaque un succulent petit déjeuner dans la salle à manger aux vitrines richement garnies de cuivres, argenterie, porcelaines…porridge, bananes, œufs au plat, toasts confiture/beurre, légumes en sauce, pot de café. Il y a là un vieil Anglais nostalgique revenu visiter les lieux, où il a étudié tout jeune pendant la domination britannique.