1h30 de traversée et nous voilà sur l’autre rive. A nouveau une piste sableuse de 15 km mène à la NH52, mais les Français m’y emmènent, ouf ! Une galère en moins.
Ils me déposent à un carrefour vers le village de Sonangaon, où je provoque un gros attroupement autour du vélo.
Je prends la direction ouest, la route est défoncée, sableuse, caillouteuse, je n’avance qu’à 10/12 km/h. Les locaux sont bien sympathiques, plusieurs types à moto m’accompagnent un peu pour se renseigner sur moi. Dans un village, deux jeunes me prennent en charge pour me trouver un repas qu’on ne voudra pas que je paie. J’arrive à Dhemaji vers 16h, encore arrêté et questionné par des policiers qui deviennent un peu casse-pieds ! Je dois même aller me faire enregistrer au poste de police, mais des types sympas assis devant m’accompagnent jusqu’à la Tourist Lodge, toute neuve. La peinture commence déjà à s’écailler dans la chambre presque nue.
Douche froide, balade du soir dans la petite ville aux boutiques encore ouvertes. J’y rencontre un des types de tout à l’heure, Gogoï, un professeur en retraite qui gère une librairie-imprimerie avec ses deux fils et un ouvrier. Originaire du Yunnan, il fait des recherches sur la culture thaïe. Il a séjourné à Chiang Mai en Thaïlande où il a connu un professeur français nommé Gabonnet.
Des menaces terroristes pèsent sur la région en ce 26 janvier, fête nationale indienne, le « Républic Day ».Hier des insurgés ont fait sauter un bout de voie ferrée vers Dhemaji. Les policiers sont partout, m’arrêtent souvent mais me laissent rapidement repartir quand je leur dit encore que je viens d’être fouillé. 20 km après Dhemaji, je retrouve un bon goudron, un paysage plus vert, cocotiers, bananiers, bambous, rizières, grands troupeaux de vaches et quelques buffles d’eau. Sous les nombreux ponts enjambant les rivières presque à sec, je regarde les casseurs de cailloux, une activité très développée en Inde, au marteau, chaque individu fait son petit tas, souvent des femmes et des enfants. Je trouve facilement à manger dans les « Dhabas », restos de bord de route, chaque fois l’occasion de discuter. Je vois sur ma droite les montagnes de l’Aranuchal Pradesh. Etape à North Lakhimpur, puis je roule, maintenant en T shirt après la fraicheur matinale, 150 km pour atteindre de nuit Biswanath Chariali, ville qui n’est même pas sur ma carte. Je ne suis pas le seul à rouler à vélo sans lumière, on se prend les pleins phares des véhicules. Les étourneaux se rassemblent en bandes immenses, les grosses chauves-souris à fruits partent au ravitaillement, emplissant le ciel de leur vol lourd et silencieux. Pas moyen de camper, il y a du monde partout.
Le lendemain, atteint de crises de toux de plus en plus fréquentes, je prends à Balipara la petite route qui mène à l’éco camp en bordure du parc national Naméri., doublé et croisé sans arrêt par des convois militaires, m’obligeant à rouler sur le bas côté. Une piste forestière mène au camp, grand parc herbeux avec des bungalows en toile, un accueil chaleureux.

Un touriste indien, médecin, me fait une ordonnance. Je ne fais que des petites balades à pieds, admirant les sauts du Langur capé, un singe rare qui a élu domicile aux alentours du camp. Ils grimpent parfois sur les poutres d’un grand réfectoire en bois et s’amuse à pisser sur les visiteurs !
La toux m’empêche d’accepter la proposition d’un groupe d’Allemand de les accompagner en rafting sur la rivière Naméri. Je me repose, fais la sieste au bord de la rivière, deux éléphants sauvages traversent un peu plus loin, ils rôdent parfois le soir vers le camp. En fin d’après-midi, on peut voir le calao, imposant oiseau avec son casque lui servant de caisse de résonnance, son cri puissant et son vol lourd et bruyant.
26 km plus au nord, je rejoins Bhalukpong que la frontière de l’Aranuchal Pradesh traverse en son centre, et pas moyen d’aller au-delà sans permis, c’est bien surveillé.